Sans la libéralisation du secteur audiovisuel, notre démocratie sera toujours incomplète”

Le Ministre de la Communication et des Relations avec le Parlement, Me Hamdi Ould Mahjoub, a souligné que sans la libéralisation du secteur audiovisuel, notre démocratie sera toujours incomplète.

Le Ministre présenté une communication jeudi  en Conseildes ministres dont voici l’intégralité:

 

“La libéralisation du secteur audiovisuel mauritanien voulue par le législateur à travers la loi 045-2010 est un processus qui introduit une mutation fondamentale pour l’avenir de notre pays aussi bien au niveau interne qu’externe. Il répond à une demande légitime de la population et procède dune volonté affirmée du Président de la République, lequel en avait fait un engagement électoral.
Sans cette libéralisation, notre démocratie sera toujours incomplète et les changements politiques régionaux qu’on doit analyser dans le mouvement plus global de la mondialisation économique et communicationnelle, mettent en évidence cette affirmation.
Parce que la réussite ou non d’un tel processus est vital pour notre pays et notre système politique en termes de stabilité politique, de développement économique, culturel et social, il est impératif d’en maîtriser les clés de succès.
Cette communication qui porte sur la mise en œuvre de la loi relative à la libéralisation de l’audiovisuel abordera successivement l’évolution attendue au niveau du secteur public audiovisuel, au niveau du secteur privé et enfin au niveau du secteur associatif:
I- Le secteur public:
La réussite du dispositif de lancement du processus de libéralisation de l’audiovisuel, passe nécessairement par la mise en place des leviers juridiques, institutionnels, technologiques et humains nécessaires à la restructuration du secteur public.
1- La radio et la télévision:
Le premier niveau de la restructuration du secteur public concerne la transformation de la radio et de la télévision publiques en sociétés anonymes de service public.
-Le concept de locomotive:
Même si d’un point de vue purement politique toutes les attentes se focalisent sur la libéralisation du secteur privé, dont la teneur symbolique est puissante, le rôle que se doivent de jouer la radio et la télévision publiques n’en demeure pas moins fondamental, au niveau opérationnel, pour la réussite du processus de libéralisation dans son ensemble. Elles doivent être considérées comme une locomotive pour les secteurs privé et associatif, bénéficiant par conséquent, d’une attention particulière en terme d’efforts financiers et stratégiques.
– Le passage au statut de société anonyme :
Pour ce faire, le passage au statut de société anonyme, qui est par ailleurs une obligation légale, doit bénéficier d’efforts soutenus et rapides de la part des pouvoirs publics. Il s’agit d’un processus lourd, qui doit être mené en plusieurs étapes. Il convient de créer par arrêté au cours du mois de mai 2011 une Commission de Restructuration de l’Audiovisuel Public (CRAP) dont les missions porteront sur:
-un audit de la radio et de la télévision
-un projet de statuts pour les nouvelles sociétés
-un projet de règlements intérieurs et de statut du personnel
-un projet de contrat programme
2- La télédiffusion:
La question de la télédiffusion pose une double problématique. D’abord l’efficacité de la diffusion de la radiotélévision publique dans une logique de simulcast (technologie analogique et numérique à la fois pour préparer la transition numérique). Ensuite, l’allégement des charges d’investissement des futurs opérateurs privés télé et radio, qui pourront ainsi louer un service de qualité. Elle pose enfin la question de la souveraineté en matière de télédiffusion.
Nécessité et enjeux d’un organisme public de télédiffusion (TDM):
En Mauritanie, le déficit d’équipements de diffusion analogique et surtout numérique de TVM/RDM est donc plus une opportunité qu’un handicap, puisqu’elle devient un argument supplémentaire pour la création d’une société anonyme publique qui s’occupera de manière spécialisée de ce domaine. Cette société vendra ses services aux opérateurs du service public et ceux du privé.
Il convient de créer à cet effet, par arrêté, une Commission de Mise en Place de l’Organisme de Télédiffusion (CEMPOT), dont la lettre de mission portera sur:
-Evaluation des moyens de télédiffusion actuellement exploités par la radio et la télévision et qui feront partie du patrimoine de la nouvelle société;
-un projet de statuts de société anonyme;
-un projet de règlements intérieurs et de statut du personnel.
II -Le secteur privé:
L’ouverture du secteur de la communication audiovisuelle à l’initiative privée est une contrainte autant qu’un pari d’avenir, dont l’impact en termes d’image et de développement pour la Mauritanie est fondamental. Néanmoins, libéralisation ne veut pas dire libération désordonnée. Ce processus doit obéir à des règles précises, dictées par la spécificité du système politique et économique mauritaniens, pour se donner toutes les chances de réussite. Aussi bien les partenaires étrangers que les acteurs nationaux ont conscience que la libéralisation audiovisuelle est un processus sensible et délicat, dont les retombées positives sont à la hauteur des risques. Pour cette raison, un certain nombre de contraintes imposent une démarche calculée et réfléchie, seule à même d’en garantir la réussite.
1- Les contraintes endogènes et la libéralisation:
Régulation et sécurité audiovisuelle:
La libéralisation des ondes doit s’accompagner d’une régulation efficace, afin de prévenir tous les débordements qui pourraient en menacer la réussite. C’est la raison pour laquelle le nombre et la qualité des opérateurs autorisés doivent être proportionnels à la capacité de régulation du secteur privé. Or, force est de constater que pour l’instant, les moyens de la HAPA demeurent modestes aussi bien en termes d’expérience, de ressources humaines que de moyens techniques et financiers.
Il convient donc de mesurer précisément le niveau d’attribution de licences en fonction de ce facteur fondamental afin de préserver une marge de manœuvre nécessaire à la garantie de la sécurité audiovisuelle qui peut être menacée par des contenus trop abondants mais de mauvaise qualité.
La rareté des fréquences et la notion de stock radioélectrique:
Le spectre des fréquences audiovisuelles est limité. Il s’agit d’une denrée rare, surtout en mode analogique. En moyenne, chaque site de diffusion (une cinquantaine en Mauritanie) dispose de 6 à 14 fréquences en FM et de 5 à 10 fréquences en UHF/VHF. Il faut donc distribuer ce capital de manière parcimonieuse, en fonction d’une multitude de critères complexes. Par ailleurs, cette démarche doit se baser sur une approche de stock, qui permet à l’Etat de disposer de fréquence en cas de modifications conjoncturelles pour corriger les déséquilibres.
Faiblesse et incertitude des sources commerciales de financement :
Dans le monde entier, la publicité constitue la principale source de financement du secteur audiovisuel privé dont il ne faut pas perdre de vue qu’il est d’abord à but lucratif. Or, en Mauritanie, le secteur publicitaire est faible, opaque et très peu structuré ; ce qui s’explique par des données macro-économiques, institutionnelles, réglementaires mais également psychosociologiques. L’attribution de licences doit prendre en considération ces données, afin de maîtriser la structure et la nature des capitaux entrants. En effet, un opérateur qui dit pouvoir se passer de publicité, cache un risque potentiel de financement occulte qu’il convient d éviter, à tout prix.
Pour organiser le secteur de la publicité, une large concertation avec ses principaux acteurs en vue devrait aboutir à la mise en place d’une législation adéquate.
2- Les principes directeurs de la libéralisation:
Afin de pallier l’ensemble des contraintes évoquées ci-dessus, il convient d’adopter une approche de libéralisation basée sur des principes simples mais efficaces.
La Progressivité:
la libéralisation doit être progressive, afin de pallier un afflux massif de nouveaux opérateurs privés qui pourrait déstabiliser l’équilibre communicationnel mauritanien tout en permettant de tenir compte de la capacité de régulation et d’assurer la qualité des programmes .Cela permet de récolter les fruits politiques et économiques de la libéralisation tout en limitant ses risques stratégiques.
La diversité et la complémentarité:
Ensuite l’attribution de licences doit se faire sur la base de la diversité optimale couplée à une complémentarité afin de servir l’intérêt du public et assurer le succès à l’investisseur privé, sans créer des doublons ou de la concurrence non constructive.
Viabilité et indépendance:
L’évaluation des projets doit être pointue et irréprochable, car tout laxisme à ce niveau génétique peut avoir des conséquences incalculables. Tout échec d’un opérateur est d’abord un échec des autorités publiques ayant décerné la licence. La viabilité économique et éditoriale doit être établie plutôt deux fois qu’une même lorsque les projets présentent toutes les garanties.
Le concept de génération:
Pour garder la main sur la configuration future du paysage audiovisuel privé, l’Etat ne doit pas se positionner dans une logique de guichet (premier venu premier servi), mais plutôt dans une logique de génération de licence (avec appel à manifestation d’intérêt et appel à concurrence), afin de conduire les porteurs de projet vers les canevas prévus et non pas désirés.
III – Le secteur associatif:
Le secteur audiovisuel associatif est capital pour le développement à venir du paysage audiovisuel mauritanien, surtout au vu des caractéristiques économiques, culturelles, linguistiques, démographiques et ethniques de sa société. Néanmoins, il ne faut pas céder à la facilité, car tout empressement pourrait être fatal, à l’image de ce qui s’est passé au niveau de la presse écrite en termes d’anarchie, d’absence de qualité et de respect des règles déontologiques. Pour ces raisons, il convient d’opérer selon une démarche mesurée et sereine en la matière.
Le Décret:
Tout d’abord, il convient de publier le Décret prévu par l’article 18 de la loi n° 045-2010, mais pas avant l’attribution des licences privées, afin de ne pas encombrer et déséquilibrer les instituions publiques œuvrant dans le domaine.
Le temps de latence et le concept de génération :
Cette démarche permettra au Ministère de la Communication et la HAPA d’observer un temps de latence nécessaire à l’analyse du processus d’attribution des licences privées et de restructuration du secteur public. De même, elle permettra de mieux prendre connaissance de la réalité du secteur associatif audiovisuel et de réglementer de manière plus pertinente et adaptée le processus d’attribution des licences associatives.
La première génération de licences associatives pourra ainsi voir le jour immédiatement après l’attribution des licences privées.
Telles sont les grandes lignes de cette communication que nous soumettons à votre approbation

Date de publication : 21/05/2011 14:59:59

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